De la création, de l’inspiration, de la copie

Ecrire est pour moi, lecteur, source de nombreux contentements. C’est un acte à la fois poétique – en cela qu’il m’offre la possibilité de travailler ma langue maternelle, la faire sonner agréablement à mon oreille, parfois même la faire chanter, voire inspirer le beau – et politique, car il me semble moteur de réflexions sur la société, ses aspirations, ses travers et ses actions mélioratives.

Proposer un texte à la lecture par un public revêt un sens tout particulier pour moi. Mes billets, parfois emprunts de fougue, d’émotions, de colères, de joies se veulent porter un message, peut-être non pas universel, mais au moins qui se veut entendu et partagé par ceux qui prennent la peine de les parcourir.

Je prends grand soin d’équilibrer mon propos, et ma posture face à mes exercices d’écriture est le miroir de celle que j’adopte dans ma vie. Ainsi, comme tu l’auras sans doute remarqué si tu connais mes écrits (précédemment publiés ici http://rienaredire.unblog.fr) la manière dont je choisis de présenter des « instantanés de vie » se veut ouverte au monde, et, dans la moindre mesure, aussi lumineuse et positive qu’il est possible de le faire.

La narration, telle que je la conçois, se doit de magnifier les faits, les rendre porteurs d’un sens qui va bien au-delà de leur seule observation, et, en cela – c’est mon point de vue – permettre à celui à qui elle est proposée de se retrouver à la fois en lui-même et en un « ailleurs » plus riche et plus coloré que le monde dans lequel il se meut sans avoir le temps ou la possibilité de prêter garde à sa grandiose beauté.

Je fais miens, de fait, les principes d’écriture de Stevenson, tels qu’il les a si bien énoncés dans The Lantern-Bearers (lire ici le texte intégral). Tu comprendras donc, ami lecteur, que mes goûts littéraires s’orientent davantage vers Borges que vers Dickens, vers Dumas que vers Balzac, vers Leroux que vers Céline.

Note toutefois que je ne dénigre en rien les propositions de ces auteurs. Stylistiquement, elles sont tout à fait acceptables, car travaillées et riches de sens. Mais seulement, elles semblent pour moi offrir une lecture d’un monde fermé sur lui-même, souvent nauséabond et faisant la part laide plutôt belle à la condition humaine.

Je déplore par ailleurs que ces « observateurs » ainsi que les nomme Stevenson, soient légion, et qu’aujourd’hui nombre d’auteurs, publiés et reconnus, ou confidentiels et en devenir, choisissent la voie « réaliste », voire « expressionniste » qu’ont tracé les écrivains du 19ème siècle, plutôt qu’une plus éclairée ou même, soyons fous, magnifiée.

Car au-delà du texte lui-même, il est un message qui se transmet. Ainsi que j’en faisais état plus haut, écrire est un acte politique, dans le sens où il offre une lecture du monde, et qu’il enrichit celui qui le consulte. Il peut même le faire se mouvoir. Lorsqu’il y a texte, il y a usage de langage en tant qu’acte, lequel est alors souvent un performatif, déguisé ou non, d’ailleurs. Ainsi, lorsque je produis un billet qui ouvre les portes d’un hammam, je veux partager avec mon lecteur l’atmosphère qu’il y règne, je cherche à l’emmener se baigner mentalement dans les vapeurs des bains. Lorsque je décris une « Zone Urbaine Sensible », c’est afin de donner à lire ma vision de ce monde, permettre à ceux qui en sont éloignés de la mieux comprendre, tout autant que donner la possibilité à ceux qui y vivent de s’y retrouver.

Je ne prends mes mots nulle part ailleurs que dans ma tête, mon lexique et mes ressentis.

Concernant le choix de thèmes de mes billets, ils peuvent m’être inspirés par un fait d’actualité, une anecdote, parfois la requête d’un lecteur. Je ne me force jamais à écrire. Ainsi que je l’avais indiqué dans la toute première de mes publications :

Tenir un blog de manière inassidue. Donc sans le « tenir »… Juste quand ça nous chante. Histoire de publier des trucs. Envoyer son point de vue aux quatre coins d’un monde qui palpite, grésille, chuchote, informe, dans une cacophonie générale. 

Etre « inassidue », c’est me permettre de n’écrire que pour le plaisir de transmettre et de partager. C’est pouvoir également totalement assumer et revendiquer chaque mot que j’offre à lire. C’est pouvoir justifier d’avoir choisi celui-ci plutôt qu’un autre.

Ces textes, ils sont totalement miens, ils sont ce que je donne au monde de moi-même. Et ils forment ma part de lumière.

Il y a peu, j’ai pu retrouver sur un autre blog des pans entiers qui m’avaient été pris. Sans que je n’aie jamais été consultée par le voleur en question, que je ne connaissais pas, par ailleurs, et dont j’ignorerais encore l’existence si un heureux (ou malheureux?) hasard ne m’avait fait découvrir la forfaiture.

Cet acte de plagiat avéré et reconnu par ceux qui ont pu consulter le texte avant que le fautif ne le retire m’a permis de m’interroger sur ce qu’est la création, l’inspiration, le recopiage, le vol, le détournement. Et en cela, je remercie le plagiaire. Il m’aura offert la possibilité de comprendre que même au-delà de possibles velléités mercantiles, il est des êtres humains capables de voler uniquement pour briller sans effort en s’appropriant le travail d’un autre.

Je le remercie également de m’avoir montré que mes billets étaient dignes d’intérêt puisqu’on ne dérobe jamais que ce qu’on désire… En cela, j’ai donc confirmation que mes textes ont assez de qualité pour qu’on les emprunte. Et je dois avouer que je m’en sens honorée.

J’espère avoir plaisir à t’offrir encore, lecteur, de quoi te réjouir, t’intéresser, te donner à réfléchir, à questionner. J’espère que tu seras là pour les prochaines aventures, et que cela te donnera l’envie, à ton tour, de créer, agir, impulser une ouverture aux autres, et enrichir le monde par les liens que toi-même tu créeras.

Mais n’oublie pas : prends avant tout ce qui est en toi, et donne-le, c’est bien meilleur que ce que tu pourras trouver en dehors de toi, et ta posture à la vie et au monde t’apportera alors de bien grands plaisirs.

6 réflexions sur “De la création, de l’inspiration, de la copie

  1. Parce qu’en se cristallisant les mots ont la capacité de faire affleurer du sens, de formaliser, donner de la consistance à une pensée qui sans eux en resterait à un état invertébré 😉
    ps: La délicatesse acérée de ta plume ne manque jamais de conjuguer ce postulat sur un mode aussi altruiste qu’éclairé !
    a presto, Antoine

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    • Cher Antoine,
      Merci pour ce commentaire. Il est toujours aussi agréable de te lire, non seulement parce que tu m’honore, mais qui plus est car ta plume à toi est unique, rythmiquement parlant!
      Très heureuse de te retrouver ici.
      Et ainsi que tu le dis :
      A presto,
      Emilie

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  2. Merci pour ces mot qui parlent de toi et de tes goûts.Perso, j’aime Balzac ou Bukoswki et la noirceur de leur monde. Et c’est tant mieux.
    Continues à nous régaler 🙂

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  3. Il y a dans les mots tant de précision et de mystères mélangés…
    La vraie question a mon sens est quand sommes-nous dans un moment de création et quand sommes-nous dans un instant d’admiration si forte que l’on veut s’approprier un peu de celui ou celle qui a, par sa création, suscité une émotion suffisamment forte et marquante.
    Dans un monde d’écriture de blog qui se veut sans contrainte, sans attache, il est difficile de mettre un « droit d’auteur » ou même un « droit d’inspiration ». On ne peut espérer que ceux qui apprécie nos mots aient l’éducation et la bienséance nécessaires pour qu’il n’y ait jamais de sentiment de spoliation. On ne peut qu’espérer…. et se garder d’en vouloir, à mon sens, à ceux qui n’ont ni l’une ni l’autre…
    Comme disait un pote cheminot: « Mets du charbon dans la machine, Camarade, t’occupes pas des signaux ». Concentre toi sur l’échange, celui qui t’inspire, celui qui te plait… c’est à ce moment là que tes écrits sont le plus fort et le plus agréable… On ne gagne qu’à entretenir l’affection de ceux à qui l’on plait déjà

    Bisouilles Emilie et bienvenue sur WordPress

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  4. Le vol de mots est une traîtrise qui m’a fait aussi quitter bien des lieux! et à réapparaître ailleurs sous une nouvelle identité, un autre « chez moi »! Ta verve est loin d’être à la hauteur de la mienne : (moi je suis petit , toi tu es grande!) . Tu es toi, tu es unique, tu sais ce que tu écris, vis et c’est ce qui importe le plus au monde, tnn monde !

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